12 Mai

Différence, identité, unicité

Deux histoires, un même combat

Dans la première scène, un homme seul, voûté, la tête entre les mains, tente de contenir un mal qui ronge sans laisser de traces visibles.

Dans la seconde, c’est une femme qui s’effondre, brisée par l’épuisement et la douleur, miroir inversé mais tout aussi brutal.

Ils ont l’air de tout opposer :

Ces deux histoires, racontées séparément, semblent décrire des réalités distinctes ; pourtant, l’une est l’autre. C’est la même lutte silencieuse, simplement reflétée par des visages différents. La fibromyalgie ne se laisse pas enfermer dans un seul genre, un seul corps, une seule trajectoire. Elle s’infiltre, altère, puis s’impose — avec une constance glaçante — quels que soient l’âge, le sexe ou le rôle social.

Identité partagée

Ce qui frappe, c’est l’identité involontaire que la maladie crée : patients, familles, proches, tous embarqués malgré eux dans la même barque, rames en main.

On croit toujours que « ça » n’arrive qu’aux autres, jusqu’au jour où la douleur chronique devient le nouveau lit de camp autour duquel s’organise la vie. À ce moment-là, les différences de surface (le genre, le poste, la force physique) s’effacent ; ne reste qu’une communauté d’expérience marquée par :

  1. La fatigue qui ne cède jamais.
  2. Le scepticisme extérieur : « Mais tu n’as rien ! »
  3. La quête d’une reconnaissance médicale et sociale trop lente.

Différence préservée

Reconnaître cette identité partagée ne doit pas annihiler la différence individuelle. Chaque patient garde son histoire, son seuil de tolérance, ses conquêtes quotidiennes : l’homme qui retourne travailler malgré les nuits sans sommeil ; la femme qui refuse de renoncer à sa passion pour la lecture ; les enfants qui apprennent tôt la compassion et l’art de jouer doucement pour ne pas ajouter au tumulte. L’unicité survit au diagnostic ; elle le colore, le nuance, le rend supportable — parfois même source de créativité.

Unicité revendiquée

Être « vu et reconnu », le slogan du 12 mai 2025 porté par Fibromyalgies.fr, c’est exiger deux choses :

  • Une place dans le discours public, loin des clichés de paresse ou d’hypocondrie.
  • Un traitement sur mesure, parce que chaque corps raconte la fibromyalgie à sa manière, et qu’aucune prise en charge « copier-coller » n’en vient à bout.

Conclusion

Deux histoires, donc, mais un même fil rouge : la dignité. Celle qu’on défend quand on refuse de minimiser la douleur. Celle qu’on protège quand on écoute, sans jugement. Celle qu’on célèbre quand, malgré l’effondrement, on trouve encore l’énergie de s’étreindre.

Le 12 mai, la carte de France se pare de bleu pour éclairer ces vies que la maladie tient dans l’ombre. À nous — proches, soignants, décideurs — de transformer cette lumière fugace en changements durables. Parce qu’au fond, l’une est l’autre : la différence fait l’identité, et l’identité revendique l’unicité. Ignorer ce triptyque, c’est condamner les patients à l’invisibilité ; le reconnaître, c’est déjà les soulager d’une part de leur fardeau.