Fibromyalgie

Apprendre des traumatismes ? Peut être pas !

A certains moments, il faut savoir évoluer. Et avec la fibromyalgie, je n’ai jamais arrêté. Tous les jours je suis obligé de me remettre en question. Ça ne concerne pas forcément la fibromyalgie, mais tout un ensemble, lié de près ou de loin, à la fibromyalgie (et sans doute aussi aux maladies chroniques en particulier).

Il y a quelques temps, une amie (modératrice de plusieurs groupes Facebook et de diverses chaines you tube ) avait évoqué la douleur invoquée en précepte de vie pour s’améliorer et grandir, en sortir plus fort, comme le fait qu’il s’agissait de l’une des plus belles hypocrisies de l’histoire (notre morale judéo-chrétienne) ayant enfoncé fortement le clou, mais on retrouve la souffrance comme mode de pensée sociétale à peu près partout dans le monde), et, que, bon,

Autrement dit, flûte ! ou diaule, en bon français

La douleur cet  » éternel ennemi du genre humain « 

Jean-Christophe Courtil, « La souffrance physique dans l’Antiquité : théories et représentations », Pallas [En ligne], 88 | 2012, mis en ligne le 08 juin 2015, consulté le 16 mars 2022. URL : http://journals.openedition.org/pallas/2408 ; DOI : https://doi.org/10.4000/pallas.2408

C’est une idée (la douleur) que j’ai beaucoup étudié à un moment, afin de comprendre la fibromyalgie, aussi bien avec les philosophes antiques ou récents, que par mes discussions avec les malades et les médecins.

Un résumé ici.

Depuis l’Antiquité on trouve trace de la douleur (algos), et de l’interrogation sur celle-ci.

Les Épicuriens pensaient que, par nature, la maladie et la douleur ne font pas souffrir très longtemps, car la souffrance et la douleur sont soit « brèves ou chronique… soit légère soit intense, mais la gêne qui est à la fois chronique et intense est très rare ; donc il n’y a pas besoin de se préoccuper au sujet de la souffrance. » Comme « le bonheur est facile à obtenir », reconnaître sa limite physique et mentale et son seuil de douleur et demeurer confiant dans le fait que le plaisir suit toujours la douleur (et évite l’anxiété au sujet de la douleur) est le remède contre la souffrance prolongée.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Tetrapharmakos

Cependant au delà des plaisirs volatiles, qui imposent une quête toujours plus ardue (alcool, ou drogues par exemple), il vaut mieux rechercher les plaisirs qui apportent stabilité dans la durée, comme la lecture, ou la nature. Un calcul à faire.

Qui ne s’est pas reçu une réflexion de ce genre ? Tu peux avancer, et faire des efforts. Ce que tu as n’est pas mortel. Arrête de gémir, de te plaindre, de pleurer, de geindre, ; lève-toi et marche. Sors, va faire du sport, à ton âge (quel que soit celui-ci) je ne m’écoutais pas, moi. N’écoutes pas tes douleurs, fais des efforts….etc…etc…

Jean-Christophe Grangé ne semble pas partager cet avis dans son livre « Le passager »

https://citations.ouest-france.fr/citation-jean-christophe-grange/tue-rend-fort-connerie-moins-108251.html

Non seulement la souffrance n’endurcit pas, mais elle marque, physiquement, même si le corps humain a des capacités de régénération quelquefois. La douleur meurtrit autant l’âme.

Quelque soit les traumatismes, il en reste des traces. Guerre, enfermement, mise à l’écart, stress, post-traumatique ou non, viol, deuil, violences, chutes (et pas seulement dans l’escalier, les mises au placard sont aussi des chutes aux enfers), et maladie sont autant de calvaires, qui, même si l’on arrive à s’en relever, laissent des traces indélébiles sur ou dans le cops, et le cerveau.

C’est pour cela que les thérapies comportementales et cognitives ont autant le vent en poupe, ou les coachs bien être. Le mieux être de toutes nos forces. Nous ne discuterons pas de leurs succès ici, ni de leur efficacité.

Au vu des discussions sur notre groupe Facebook Fibromyalgies.fr Groupe Public on voit bien toute la difficulté d’arriver à continuer et rebondir, au fil des épreuves, et en particulier de la maladie. Mais pas que, car à vous entendre, les difficultés et douleurs sociales et sociétales sont nombreuses et fortes, telles que les abandons familiaux, la perte d’emploi, les divorces, les soucis financiers et administratifs et surtout et bien trop souvent le désespoir de la solitude. Et pour le mental, le fait de ne pas être entendu dans sa souffrance, et non reconnu comme malade souffrant réellement est bien trop fréquent.

« La (ma) douleur est une expérience subjective  » ; « une expérience sensorielle ou émotionnelle désagréable associée à un dommage tissulaire présent ou potentiel ou décrite en terme d’un dommage »

Définition de l’Association Internationale pour l’Étude de la Douleur (IASP) en 1976

Ferry, Juliette (2017), «Douleur (GP)», dans Maxime Kristanek (dir.), l’Encyclopédie philosophique, consulté le …, https://encyclo-philo.fr/douleur-gp

Personne ne peut être spécialiste de ma douleur, moi seul en fait et en a l'expérience.

 Il faut mentionner ce type de douleur physique spécifique, que vous connaissez trop bien, qui pose de plus en plus problème à la pratique médicale : les douleurs chroniques. Il est important de souligner qu’une douleur chronique n’est pas seulement une douleur aigue qui se prolonge dans le temps….

Ferry, Juliette (2017), «Douleur (GP)», dans Maxime Kristanek (dir.), l’Encyclopédie philosophique, consulté le …, https://encyclo-philo.fr/douleur-gp

Toute douleur est un mal, la supporter est difficile.

http://www.daniel-pimbe.com/pages/cours/page-34.html

Même si elle est un signal d’alarme utile.

Sauf que avec la douleur chronique telle que celle de la fibromyalgie, nous sommes bien loin de l’ataraxie.

(la tranquillité paisible du corps et de l’esprit, ce sentiment de bien être dans un équilibre complet du corps et de l’esprit – aponie).

Il existait même un médicament dans l’antiquité pour atteindre un niveau de quiétude comparable au bonheur Le Tetrapharmakos. (je ne vous conseille pas de tester).

La douleur, personnelle, visible ou invisible, est un traumatisme qui impacte durement, terriblement, longuement. Surtout quand elle ne joue pas son rôle primaire, qui est d’alerter. Mais devient maladie elle même. La Fibromyalgie, aujourd’hui avec la Classification internationale des maladies (CIM-11) est

maladie de la douleur

Une douleur diffuse chronique ou douleur chronique généralisée. Mais pas que….

Description: La douleur chronique généralisée (DCG) est une douleur diffuse dans au moins 4 des 5 régions du corps et est associée à une détresse émotionnelle significative (anxiété, colère/frustration ou humeur dépressive) ou à un handicap fonctionnel (interférence dans les activités de la vie quotidienne et participation réduite aux rôles sociaux) [1]. La PCM est multifactorielle : des facteurs biologiques, psychologiques et sociaux contribuent au syndrome de la douleur. Le diagnostic est approprié lorsque la douleur n’est pas directement attribuable à un processus nociceptif dans ces régions et qu’il existe des caractéristiques compatibles avec une douleur nociplastique [2] et des facteurs psychologiques et sociaux identifiés.

https://icd.who.int/browse11/l-m/fr#/http://id.who.int/icd/entity/849253504 – extrait de la cim 11

Maladie de la douleur, syndrome en France….mais en tout cas, avec 900 pages d’expertise collective de l’Inserm, toujours aussi peu soignable.

C’est pourquoi cet article de Slate.fr

On ne devient pas automatiquement une meilleure personne après un traumatisme

m’oblige à m’interroger de nouveau.

« Ce qui ne me tue pas me rend plus fort »

Merci, Nietzsche. Sauf qu’il ne parlait que de lui. Et éventuellement d’une catégorie particulière de personnes.

Sauf que, cette théorie qui veut que l’on soit capable de se relever dans l’adversité, en ayant appris, en étant plus fort, par son système de résilience, est remise en question. Et depuis un moment en fait.

La «croissance post-traumatique» idée de l’amélioration par l’expérience du traumatisme, est fortement en question (d’après cette théorie, plus de 70% des gens seraient en capacité de rebondir)

Ces études sont aujourd’hui remises en cause: elles pourraient contribuer à empirer l’état psychologique de certaines victimes de traumatismes, en leur intimant une pression à la résilience et à l’amélioration de soi.

http://www.slate.fr/story/224721/apres-traumatisme-pas-automatiquement-meilleure-personne-sante-mentale
  • Les études comportent des biais, occultant les questions négatives, concentrées sur le positif.
  • La mémoire humaine est sujette à se rappeler du positif plus que du négatif

Oui, on s’améliore, la plupart du temps. Et même après un épisode traumatique. Mais cela ne va absolument pas de soi.

Du coup, on va peut être mieux comprendre ce qui a été trouvé dans l’expertise collective de l’Inserm. Ces catégories de malades qui arrivent à la résilience. C’est loin d’être pareil pour tous.

Du coup j’en viens à plusieurs interrogations, la discussion est ouverte.

  1. Une attitude positive vous fait du bien?
  2. « Ne rien faire » vous aide?
  3. Chercher le beau, le calme, l’apaisement c’est efficace?
  4. Les jolies images déposées sur le groupe vous font du bien?
  5. Les diverses discussions qui souvent sont très fortes émotionnellement, vous rapprochent ou vous émeuvent trop?
  6. Que pouvons nous apporter en sus ?
  7. Voudriez vous participer ?

Les réponses à ces questions, sont propres à chacun, et pourtant beaucoup s’y reconnaitront. Car au final, peu importe que ces douleurs soient récentes ou lointaines, fortes ou faibles, aux jambes ou aux bras, tous, vous souffrez, de la même façon, et gardez les traces à l’intérieur de votre corps et de votre âme.